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Un agriculteur se livre

Publié le 14 mars 2003 dans 2003

Agriculteur retraité à La Clayette, André Livet a rassemblé ses souvenirs dans un ouvrage, dont les bénéfices seront reversés à l'association "Le Défi Anthony", mobilisée pour aider la recherche sur la leucémie.


RIEN n'avait été prémédité. Au moment de sa retraite, en 1988, à La Clayette, André Livet s'est seulement mis à rédiger quelques souvenirs et anecdotes, accumulant, au fil du temps, des pages de notes. Et puis l'abondance de la matière le décida, il y a deux ou trois ans, à écrire un petit opuscule pour ses descendants, témoignage d'une vie de labeur paysan dans le Charolais-Brionnais. Une cinquantaine d'exemplaires reliés furent distribués à la famille et aux amis. Passionnés par le récit, ces derniers conseillèrent à son auteur d'en faire un livre.
Edité à 400 exemplaires, en vente depuis la fin décembre, l'ouvrage a connu un tel succès qu'il a fallu prévoir un nouveau tirage de 400 pour faire face à la demande. Car le livre d'André Livet, intitulé « Garder le cap », n'est pas seulement une chronique du Charolais rural au XXème siècle mais se double d'un geste de générosité. L'intégralité des bénéfices de sa vente ira à l'association « Le Défi Anthony », qui multiplie les initiatives pour aider la recherche contre la leucémie (lire article ci-après).
Bien des familles d'agriculteurs ou ruraux d'origine se reconnaîtront dans cette publication, au style agréable, qui se lit comme un roman. On y goûte pas à pas l'histoire du milieu du siècle, les scènes quotidiennes de la vie à la campagne à la fois rude et simple, appuyée sur des valeurs, l'évolution technique, les changements dans les modes de vie, au fil des décennies. Une histoire vivante, au rythme d'une existence, de ses bonnes et de ses mauvaises surprises.

De la faucille à la moissonneuse
Né en 1923 à Mussy-sous-Dun, fils de paysans, deuxième d'une famille de six enfants, André Livet va quitter à l'âge de sept ans son village natal pour Colombier-en-Brionnais. Bien que doué pour les études, il se sent un devoir d'aider les parents et apprend ainsi le métier d'agriculteur. Un métier dur et exigeant puisque tout est réalisé à la main, au rythme des saisons et qu'il ne faut pas craindre la marche à pied. Trop jeune pour être mobilisé au début de la guerre, en 1939, André Livet connaîtra à Colombier la vie sous l'occupation, non loin de la ligne de démarcation, l'épisode marquant des chantiers de jeunesse, enfin la libération et l'armée.
La guerre finie, se dessina la grande révolution verte qui devait modifier en profondeur le visage de l'agriculture. L'auteur évoque notamment le rôle des femmes dans l'exploitation, le modeste équipement sanitaire des fermes, la naissance du confort, du frigo à la machine à laver.
Et puis le récit s'attarde sur la J.A.C., qui a marqué tant de jeunes ruraux, le syndicalisme, le Crédit Agricole, les nouvelles techniques d'exploitation, sans oublier quelques faits divers tragiques dans l'entourage.
La deuxième partie aborde des souvenirs plus personnels, marqués par l'épreuve. En 1955, André Livet se marie avec Germaine et, trois ans plus tard, celle-ci est atteinte de la poliomyélite. Elle ne remarchera pas mais donnera malgré tout un frère et une soeur à leur fils aîné. En 1961, la famille se voit contrainte de changer son fusil d'épaule et profite d'une opportunité pour s'installer à La Clayette. Il faut vendre le cheptel de charolaises pour se lancer dans l'élevage laitier, avec une installation en G.A.E.C. (Groupement agricole en commun) quelques années plus tard.
André Livet n'omet pas de mentionner aussi ses 18 ans de vie municipale, son combat pour l'accessibilité des personnes handicapées, quelques voyages, le soulagement de voir arriver la retraite, les engagements associatifs. Malgré la maladie de son épouse, à qui il rend un touchant hommage, M. Livet dit avoir eu
une vie « comme les autres ». Pas étonnant que ce récit d'une vie bien remplie, qui a su « garder le cap » malgré l'épreuve l'ait conduit à abandonner ses droits d'auteurs pour ceux qui souffrent....

Pour se procurer le livre

L'intégralité des bénéfices de « Garder le cap » sera reversée à l'association « Le Défi Anthony » qui soutient l'action de recherche sur la leucémie de deux hôpitaux lyonnais. L'ouvrage de M. Livet lui a valu les remerciements du professeur Michallet, du service d'hématologie de l'Hôpital Edouard-Herriot de Lyon, et du professeur Philippe, de l'Hôpital Debrousse. Le livre est en vente, au prix de 13 € à la librairie 2B à La Clayette, aux Offices de tourisme de La Clayette, Chauffailles et Charolles, au salon de coiffure Durix à Chauffailles, chez Claude Vernay à St-Symphorien-des-Bois, au bar du viaduc à Mussy-sous-Dun, à la Maison de la presse de Charlieu, chez Marcel Morin à Colombier-en-Brionnais, ou directement chez M. Livet à La Clayette, avec possibilité d'envoi par la Poste.

Multiplier les défis contre la leucémie
Une vraie leçon de volonté, de combativité et d'espoir. Tel est le sentiment qui émane de la rencontre des responsables du « Défi Anthony », à St-Symphorien-des-Bois, près de La Clayette, en Saône-et-Loire. L'association est née en 1998. Claude Vernay et son épouse venaient alors de perdre leur fils, décédé d'une leucémie. Patrick Torres, un de leur ami, leur proposa de créer une association, afin que ce combat contre la maladie ne reste pas sans lendemain.
Un malade est souvent très courageux, capable de vivre sur le fil, et donne un exemple de dignité qui nous enseigne beaucoup » constate Claude Vernay. « L'association n'a pas seulement pour but de ramasser de l'argent mais de montrer que, si on se prend par la main, on peut également faire beaucoup et, en même temps, se faire plaisir. Nous essayons de favoriser les initiatives de jeunes pour qu'ils organisent des défis et joignent l'utile à l'agréable. »
Chaque année, « Le Défi Anthony » organise pendant un week-end, une randonnée en montagne, avec coucher en refuge. Chaque marcheur verse une participation de 8 €, affectée à la lutte contre la maladie. Tout au long de l'année, d'autres défis sont proposés selon le même principe rallye-surprise, chasse au trésor, mini-olympiades, quêtes, spectacles... L'intégralité des dons est reversée à la recherche. Une somme de plus de 15 000 euros (près de 100 000 F) a ainsi pu être partagée, l'an dernier, entre les hôpitaux lyonnais Debrousse et Edouard-Herriot. Des ventes de casquettes et tee-shirts permettent à l'association d'assurer son fonctionnnement.
Régulièrement, les chefs des deux services concernés participent à l'assemblée générale du « Défi Anthony » pour expliquer, avec une grande précision, à quoi ont servi les fonds recueillis et faire part de leurs immenses besoins en matière de lutte contre la leucémie. C'est aussi une façon d'exprimer leur reconnaissance aux adhérents et ces derniers peuvent, en même temps, constater que leurs efforts produisent du concret. Cette année encore, le professeur Michallet, de l'hôpital Edouard-Herriot, et le professeur Philippe, de l'hôpital Debrousse, effectueront le déplacement, pour l'assemblée générale, prévue le vendredi 21 mars, à 20 h 30, à la salle communale de Saint-Symphorien-des-Bois. Ils devraient évoquer les dernières avancées scientifiques, réelles mais encore insuffisantes face aux maladies malignes du sang et de la moelle, si cruelles lorsqu'elles touchent des enfants.
Depuis cinq ans, « Le Défi Anthony » a su mobiliser de nombreuses familles du Charolais-Brionnais puisque l'association recense aujourd'hui 300 adhérents. Chacun d'eux essaie d'en trouver un autre afin de garantir sa pérennité. Même si l'émotion du départ s'est estompée, on veut continuer à agir pour les malades d'aujourd'hui. C'est dire que l'initiative d'André Livet a été appréciée et qu'elle a valeur d'exemple pour l'association. En début d'année. dans sa lettre aux adhérents, le président Patrick Torres, écrivait « Faisons partager au maximum cette règle d'or : Je ne suis pas responsable de la douleur du monde mais je suis responsable si je ne fais rien ».

Article de J.-F. V.,
Article de Le Pays